Maître
Zingaro
je te nomme maître de l'éphémère
toi le gardien du nom
toi l'emblème des insolences
toi le mastodonte farceur qui joue
à la bête mythologique
et prend plaisir à étirer le temps
quand on te fête comme une idole
Bartabas ta sevré et pris pour confident
il a écouté les histoires qui te hantent le sang
la plainte que tu siffles en dormant
cette violence faite à l'infini
sitôt qu'il y a des enclos des frontières
ce long chuintement des chariots
pour les migrations qui se changent en exode
toi tu rêves en effaçant tes rêves
tu pleures avec les chevaux d'Achille
devant la dépouille de Patrocle
tu ris du spectre de Tamerlan
qui dans un ciel vide
cherche où attacher sa monture
et tu ne renonces jamais aux licornes
toi tu galopes en assommant les pierres
tu sais que ta force impressionne
avec ses reflets d'argent
mais tu as l'œil câlin sous le toupet
presque confiance dans les matins du monde
au fond tu n'es pas sérieux
et tu as dix-sept ans
Extrait de Zingaro, suite équestre d'André Velte